Mission d’expertise médicale 2009 – Mise à jour 2014 – Commentaire du point 4
I – TEXTE DE LA MISSION
« A partir des déclarations de la victime (et de son entourage si nécessaire) et des documents médicaux fournis :
4.1. Relater les circonstances de l’accident.
4.2. Décrire en détail les lésions initiales, les suites immédiates et leur évolution.
4.3. Décrire, en cas de difficultés particulières éprouvées par la victime, les conditions de reprise de l’autonomie et, lorsqu’elle a eu recours à une aide temporaire (matérielle ou humaine), imputable à l’accident à l’origine de l’expertise, en préciser la nature, la fréquence et la durée ».
II – COMMENTAIRES
4.1 – Il ne s’agit bien évidemment pas de refaire ou même de résumer le constat de police à partir de l’interrogatoire de la victime. Mais il est toujours important de relater la manière dont la victime a vécu l’accident et quel souvenir elle garde de cet « événement accidentel » et de ses suites. Cet interrogatoire permet souvent de préciser, voire de rectifier, certaines indications figurant dans un certificat initial rapidement rédigé. Par exemple, il arrive qu’une perte de connaissance soit mentionnée sans que sa durée soit indiquée. L’interrogatoire permet à la victime de dire à partir de quel moment elle se souvient des circonstances de l’accident et de ses suites immédiates, sa durée approximative peut ainsi être quantifiée grâce aux souvenirs qu’a la victime des suites immédiates de l’accident.
L’écoute du blessé qui va décrire la situation d’angoisse créée dans les suites immédiates de l’accident à travers l’arrivée des secours, l’ambiance du service des urgences et l’absence ou au contraire la multiplication des examens complémentaires, permet de replacer la victime dans le contexte initial du fait accidentel et ainsi de mieux en comprendre l’évolution.
Il importe d’analyser avec le blessé le ressenti psychologique immédiat de cet accident, de chercher en particulier des conditions exceptionnelles à celui-ci, s’il y a eu mise en jeu de la vie du blessé ou de ses proches et, s’il n’y a pas eu de perte de connaissance, l’importance du stress initial pourra entraîner une symptomatologie de type stress post-traumatique. Il est bon de rappeler, sur le plan sémiologique, que cet état anciennement appelé névrose post-traumatique est connu dans la littérature internationale sous le terme de Post Traumatic Stress Desorder (PTSD) ; il appartient selon la classification DSM-IV au registre des troubles anxieux. La sémiologie clinique est la suivante : avoir été victime ou seulement avoir été témoin d’un événement traumatique soudain mettant en jeu la vie ou l’intégrité physique de la personne elle-même ou d’autrui, réaction du sujet par rapport à cet événement se traduisant par une peur intense, un sentiment d’impuissance ou d’horreur. L’événement traumatique est constamment revécu (expérience de reviviscence) de diverses façons, mémoires intrusives, cauchemars, sentiments de revivre l’accident, détresse lors de l’exposition à des situations identiques, parfois souvenirs sensoriels prééminents (feu, odeur de brûlé, bruit important…). Face à cette situation, le blessé a un comportement d’évitement (hyperréactivité dans la vie quotidienne au bruit, à la fatigue).
La perte de connaissance éventuelle est importante à connaître pour l’évaluation de la gravité d’un traumatisme crânien. Un traumatisme crânien léger est défini de la façon suivante : perte de connaissance inférieure à 30 minutes, score de Glasgow entre 13 et 15, amnésie post-traumatique inférieure à 24 heures. L’amnésie post-traumatique est un critère de gravité initial important des traumatismes crâniens, c’est le meilleur marqueur de la sévérité du traumatisme. L’amnésie post-traumatique est définie comme la durée de la période allant du moment de l’accident au moment où le patient récupère son orientation dans le temps ou l’espace et une capacité de mémorisation au jour le jour. Ainsi, d’après l’étude de M. Jennett et de ses collaborateurs (JENNETT B., SNOEK J., BOND M.R, Disability after severe head injury observations on the use of the Glasgow outcome scale. Journal of neurology, neurochirurgy and psychiatry 44 : 285-293, 1981), un an après un traumatisme crânien sévère, il y a une bonne récupération si l’amnésie post-traumatique est inférieure à 7 jours, par contre si l’amnésie post-traumatique est supérieure à 28 jours, le handicap est modéré et sévère dans près de 60 % des dossiers.
4.2 – L’expert devra décrire les suites immédiates et les traitements réalisés ainsi que l’évolution à long terme et les complications évolutives (éventuelle phlébite, embolie pulmonaire) ; il lui faudra aussi préciser la nature d’éventuelles complications plus complexes consécutives à la décompensation d’un état antérieur en particulier chez les personnes âgées. Vient ensuite le cursus post-traumatique de la victime, avec les dates précises d’hospitalisation et la spécialité des services concernés, la nature des soins ambulatoires (consultations et nom des médecins et leurs spécialités, prescriptions d’arrêts d’activité, nombre de séances de rééducation, leur rythme, les moyens de transport utilisés par la victime pour s’y rendre…). Il est utile de jalonner ce parcours par les dates d’ablation des immobilisations plâtrées par exemple, par la durée d’utilisation des cannes anglaises, etc.
Lorsque des interventions chirurgicales ont été pratiquées, il arrive que l’expert en possède les comptes rendus. Les retranscrire mot à mot n’est pas toujours nécessaire : il suffit d’en extraire les éléments essentiels. Il en est de même pour le compte rendu d’examens complémentaires ou les bilans effectués dans les services de rééducation.
La mission ne demande pas au médecin de se prononcer sur le bien-fondé des thérapeutiques prescrites, mais de faire la différence entre les traitements en relation avec l’accident et ceux qui, éventuellement, ne le seraient pas, sans se prononcer sur leur nécessité dans l’absolu (état antérieur, affections concomitantes…).
Le médecin expert doit tenter de reconstituer aussi précisément que possible, à partir de l’interrogatoire de la victime et/ou des documents qui lui sont fournis, les périodes d’hospitalisation et la nature des services fréquentés. Il n’a pas pour mission de vérifier les dires ou de les compléter par une enquête auprès des établissements concernés.
4.3 – Afin de pouvoir personnaliser au mieux le rapport d’expertise, il convient de bien préciser dans quelle mesure les lésions initiales ont été à l’origine de gêne dans les actes de la vie courante et de décrire les moyens qui ont été nécessaires pour pallier telle ou telle difficulté.
Concernant l’aide humaine, il s’agira d’en fixer la nature, la fréquence et la durée totale, en rapportant bien sûr la gêne alléguée à l’évolution médicale de la lésion.
Mission d’expertise médicale 2009 – Mise à jour 2014 – Commentaire du point 4